L’hôtel Potocki a accueilli, le temps de 48h, la première édition française du Vogue Fashion Festival. Petit retour historique sur ce festival: l’initiative est en premier lieu britannique. En effet, la première édition a été lancée à Londres, il y a déjà cinq ans. Le Vogue Fashion Festival a pour but de réunir les professionnels et les amoureux de la mode pour parler des nouveaux enjeux économiques, stratégiques et créatifs auxquels l’industrie est confrontée aujourd’hui. Cette première édition parisienne en partenariat avec Swarovski a réuni, durant deux jours, certains des acteurs clés de l’industrie autour de conférences et masterclasses. Cet article traitera plus particulièrement des nouveaux territoires créatifs de la mode, qui ont connu des évolutions importantes avec le digital.
L’image de Mode
« Comment créer une image de mode à l’heure du digital ? » fut la problématique de la première conférence. Cette conférence a été animée par Loic Prigent, avec, pour intervenants, Emmanuelle Alt, la rédactrice en chef de Vogue France, et Mario Testino l’un des photographes de mode les plus célèbres.
« Mario est Vogue. Il comprend, il aime le luxe et les femmes ». C’est ainsi qu’Emmanuelle Alt commence la conférence quand Loic Prigent lui pose une question sur son entente professionnelle avec Mario Testino. La collaboration entre Testino et Vogue est l’une des plus prolifiques du magazine, avec plus d’une cinquantaine de couvertures. D’ailleurs, la photo de couverture est l’un des premiers sujets abordés lors de la conférence. La couverture de Vogue est assurément la plus plébiscitée par les acteurs de la mode, qu’ils soient mannequins, photographes, ou créateurs. Pour obtenir cette image, la rédactrice en chef et le photographe ont pour mission de choisir la photo la plus impactante, la plus remarquable.
Mario Testino voit les changements apportés par le digital à la photographie comme une bonne chose. Obtenir une belle photo n’est pas facile selon lui, car il faut créer quelque chose qui n’existe pas forcément et qui permet à l’image de se démarquer. Le digital permet de repousser les limites de la photographie dés lors que l’on peut prendre une photo et la modifier comme bon nous semble. Cependant, le digital peut aussi compliquer le travail des magazine de mode. En effet, tout le monde aujourd’hui dispose d’un appareil photo grâce à son smartphone. Ainsi, on apprend que lorsque Vogue prépare une série mode, l’environnement est un point essentiel dans la réussite de celle-ci: il ne doit y avoir personne susceptible de capturer furtivement ce moment dans les environs du lieu du shooting.
Instagram et la mode
La deuxième conférence de l’après-midi portait sur les révolutions technologiques dans les médias, avec l’exemple flagrant d’Instagram. Les intervenants étaient Eva Chen, directrice des partenariats mode d’Instagram et Camille Charrière, fondatrice du blog camilleovertherainbow.com.
Instagram a changé la façon dont le public perçoit la mode et les personnes qui travaillent dans ce milieu, en les rendant plus accessibles. Grâce aux comptes Instagram des acteurs de la mode, on peut voir l’envers du décor et pénétrer dans un monde qui, avant, semblait complètement inaccessible. On assiste aussi à la naissance des influenceurs qui montrent une nouvelle facette de la mode, bien différente de celle des photographes, rédactrices ou mannequins. A travers, une collaboration avec une marque par exemple, l’influenceur livre sa vision de la marque et de ses produits.
Pour finir, Instagram est aussi une vitrine publicitaire pour les créateurs. Pour une jeune marque qui se lance et qui n’a pas de budget alloué à la publicité, la plateforme est un très bon moyen de gagner en visibilité. Le plus important reste le dialogue entre la marque et son audience, car c’est ce qui permet d’augmenter l’engagement des consommateurs. Avec Instagram, une marque peut développer sa propre identité et la partager avec le plus grand nombre de personne.
Une histoire de la médiatisation du couturier
La dernière conférence du festival fut une performance du directeur du Palais Galliera, Olivier Saillard, au cours de laquelle il revient sur le statut de couturier, son histoire et sa médiatisation.
Le mot couturier apparait pour la première fois dans la presse spécialisée en 1870 et il est tout de suite associé à la figure d’artiste ou d’auteur. En effet, avec le développement des marques apparait la griffe de mode, terme qui insiste sur l’identité créative et artistique du couturier. Le statut de couturier ne cesse de se développer, par le biais de certaines grandes figures de l’histoire de la mode tels que Worth, Chanel, Schiaparelli, Vionnet, Dior, Saint Laurent… A travers eux, le couturier et surtout son oeuvre sont reconnus et médiatisés. Avec Mugler, Rykiel puis Gauthier, c’est la personne du couturier lui même qui est de plus en plus médiatisée.
Aujourd’hui, on assiste à une opposition entre une médiatisation très forte du couturier à travers la figure d’Olivier Rousteing, notamment, et des apparitions beaucoup plus discrètes voire furtives comme Hedi Silmane par exemple.
Pour conclure, cette première édition parisienne du Vogue Fashion Festival montre la capacité de renouvellement du secteur de la mode et du luxe à travers le digital. L’industrie de la mode et du luxe embrasse les évolutions permises grâce au digital sans toutefois oublier ce qui fait la particularité de ce secteur c’est à dire l’intemporalité.
Pour ma part, j’imagine qu’il serait intéressant, lors des prochaines éditions, de permettre au public d’interagir avec les intervenants, notamment en ayant la possibilité de poser quelques questions à la fin d’une conférence.
Hawa Touré
Propos recueillis lors du Vogue Fashion Festival.
Credits photo : vogue.fr