A l’heure où la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) prend une part de plus en plus importante dans les services dédiés des géants de l’économie, où les esprits deviennent de plus en plus conscients de l’impact écologique des actions de chacun sur la planète, en est-il de même dans l’industrie de la mode ?
La mode, produit de consommation de masse
Portez-vous tous les vêtements de votre dressing ? Si oui, chapeau, mais je vous dirai surtout menteur. Rare sont ceux qui ont dans leurs placards une garde-robe qu’ils portent entièrement. On a tendance à jeter, ou à donner les vêtements qui ne nous plaisent plus. L’offre étant toujours plus importante, l’envie d’acheter du neuf est difficile à refréner. Acheter du neuf, pourquoi pas, mais que deviennent nos anciens vêtements ?
La mode est une grosse pollueuse. Tous les ans, plusieurs millions de tonnes de textiles sont jetés en décharge. Peu sont traités correctement, et l’utilisation de produits toxiques lors de la fabrication dudit vêtement rend son traitement en tant que déchet compliqué.
On se retrouve alors avec une problématique double : une pollution en début et en fin de vie du vêtement.
A noter que la mode est la seconde industrie la plus consommatrice d’eau, après le plastique.
Ralentir le phénomène de fast-fashion
La mode est souvent épargnée lorsque l’on évoque le réchauffement climatique. Pourtant, le « fast-fashion » – ou la grande consommation de mode dite cheap – est un des principaux acteurs néfastes. Les différents processus de fabrication d’un vêtement sont extrêmement polluants, peu encadrés, et gourmands en eau.
La majorité du tissu utilisé est constitué de fibre de coton. Quasiment tout le monde sur terre porte du coton quotidiennement. Nonobstant leur implication dans l’esclavagisme du XIXe siècle, les cultures de coton sont aujourd’hui responsables de l’utilisation de 2,6% de l’eau à l’échelle mondiale. Sa culture intensive aux alentours de la mer d’Aral est une des principales raisons de l’assèchement de la région. On estime que plus de 50% des cultures de coton ont besoin d’être fortement irriguées afin de rester productive et compétitives. Dans de nombreux pays en développement, cela représente un lien fort à l’économie…
Mais ce n’est pas tout, l’avénement du remplaçant du coton – le polyester – est certes moins gourmand que le coton en eau, mais augmente la pollution plastique dans le monde en laissant derrière lui de nombreuses microfibres, aujourd’hui non traités et très difficilement recyclables. On passera les procédés de teinture qui colorent les points d’eau et rend l’eau non potable.
Que faire alors ? Arrêter de s’habiller dans les grandes enseignes ? Privilégier l’occasion au neuf ?
Fripe et upcycling
Tous les jours, des sacs entiers de vêtements arrivent en Afrique. A Lomé, au Togo, sont vendues sur un marché dédié au recyclage des pièces laissées à l’abandon par les Occidentaux. Certaines reviennent en France et sont revendues en boutique vintage parfois plus de 100 fois leur prix initial.
Amah Ayvivi, qui tient une friperie à Paris, se rend deux fois par an à Lomé. Interrogé par Le Monde, il énonce « les bleus de travail tachés et reprisés, ça se vend des fortunes à Paris. Ici les gens ne voient pas l’intérêt, ils se disent qu’on est fous de porter des trucs pareils ! ». « Les Français cherchent le casual. Les Japonais, qui connaissent les designers, sont très pointus. Les Scandinaves sont ceux qui achètent des trucs vraiment barrés. »
Bien que cette invasion d’habits usés impacte les industries textiles locales, elle constitue un moyen de recycler et de raisonner la consommation. Une autre forme de réduction de la pollution liée à l’industrie textile est l’upcycling (soit faire du neuf avec de l’ancien). Le projet qui illustre au mieux cette pratique est celui d’Anaïs Dautais Warmel, intitulé Les Récupérables. Le principe se résume en trois points :
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ne pas utiliser de nouveau textile, seulement de la récupération, en établissant un partenariat avec des ressourceries
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respecter la main d’oeuvre, en employant des personnes en insertion sociale
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favoriser une consommation raisonnée
Certes les pièces ne sont pas données car elles sont le fruit du travail d’un créateur, mais la démarche peut être reproduite et élargie afin de la rendre plus accessible.
L’industrie de la mode prend petit à petit conscience de l’impact écologique de ses actions. Bien que les géants du prêt-à-porter n’ont pas encore pris d’actions majeures (cf campagne Greenpeace contre Gap), les créateurs se tournent vers le véganisme et beaucoup ont par exemple arrêté l’utilisation de la fourrure animale dans leurs créations.
Jules de Senneville
Sources:
Malvine Sevrin, Ces marques qui disent non à la fourrure, Marie Claire, 02/01/2018, http://www.marieclaire.fr/createurs-de-mode-renoncent-fourrure,1248534.asp
Julie Pêcheur, L’Afrique, plaque tournante de la fripe, M Le magazine du Monde, 29/09/2017, http://www.lemonde.fr/m-actu/article/2017/09/29/l-afrique-plaque-tournante-de-la-fripe_5193186_4497186.html
Fleur Burlet, Les Récupérables, la marque qui transforme les chutes de tissu en pièces mode, Les Inrockuptibles, 23/10/17, https://www.lesinrocks.com/2017/10/23/style/les-recuperables-la-marque-qui-transforme-des-chutes-de-tissu-en-pieces-mode-111000398/
Sandra Ndachengedzwa, Elena Stecca, The Fasion Industry and Its Impact on the Environment and Society, Sense & Sustainability, 02/03/2016, http://www.senseandsustainability.net/2016/03/02/the-fashion-industry-and-its-impact-on-the-environment-and-society/
Jennifer Hermes, Assessing the Environmental Impact of the Fashion World, Environmental Leader, 06/10/2014, https://www.environmentalleader.com/2014/10/assessing-the-environmental-impact-of-the-fashion-world/
Crédits :
Today’s Environmentalist
The Independent