La griffe
On parle souvent de « griffe » pour désigner l’identité d’une marque, c’est alors sa patte qu’on désigne, son univers sémiotique, son expression artistique mais aussi, et surtout, son nom. Chanel, Dior, Prada… c’est d’autant plus vrai dans le luxe, une marque se représente avant tout dans la syntaxe. Le bruit et la fureur entourant la perte de l’accent Celine le montrent bien : dès quel’on s’attaque à la graphie d’une grande maison, le scandale n’est jamais loin.C’est précisément cette sensibilité au détail qui démontre importance du logo en visibilité de marque.Le logo rappelle l’héraldique, c’est le blason moderne. Cela parle à la fois de la société de consommation et de l’appartenance à un clan. Aujourd’hui s’opposent l’ornemental du luxe et le radical minimaliste du sport. »
Jean-Charles de Castelbajac
A Pompéi, les boulangers déjà vantaient la qualité de leurs produits en y appliquant une marque qui différenciait la miche de pain lambda de leur produit de« luxe ». Cette logique traverse les époques : le sweatshirt Uniqlo ne renvoie absolument pas à la même symbolique qu’un article de facture relativement similaire chez une grande maison. Le gouffre symbolique ainsi créé tient souvent à peu de choses : le logo se fait alors vecteur de significations pour la marque, il est, comme un élément de méta publicité, amené à se promouvoir lui-même en synthétisant tous les axes de sa marque en un concentré hautement visible et reconnaissable.Tigre Kenzo et serpentGucci, système de mode et médiagénie
La tendance logotype n’est pas étrangère à nos contrées. Elle puise son inspiration dans la distance nostalgique des années 80 et 90, recréant de fait un univers fantasmé et profondément référentiel dans lequel les plus jeunes peuvent se plonger sans pour autant y avoir vécu. Le succès retentissant des collections capsule Tommy Hilfiger Jeans montre bien l’appartenance des marques et de leur logo à un système de mode au sens de Barthes : la mode est un phénomène ordonné à l’évolution discontinue et endogène, elle reste extérieure à l’histoire et par là-même peut se répéter et se réinventer à l’infini. C’est ainsi que les phénomènes Converse et Stan Smith prennent un sens. Combien de fois, cependant,une tendance doit-elle se répéter avant qu’on la considère comme classique ? Alors que les rues sont envahies de tigres Kenzo bariolés et de serpents Gucci stendhaliens, la force de l’image saute aux yeux : le logo, lorsqu’il cesse de trouver son autonomie créative à lui seul à force d’usure, renaît simplement par d’autres moyens. Ainsi, il faut trouver la forme ou l’image qui pourra le plus aisément« marquer » au sens fort, laisser la marque entrer dans l’individu.C’est tout un système de médiagénie qui se développe : le vêtement, devenu plateforme de communication, voit son sens premier détourné dans le but de renforcer le message. On peut alors comprendre la naissance des vêtements recomposés, aux coutures décalées ; les utilisations du patchwork, du fluo ou encore des polices gothiques et illisibles. Toute stratégie est bonne pour rompre la monotonie du logotype et engager, à travers la vision du quidam, tout un engrenage de réflexion – parfois même involontaire – sur la mode.Le cas Margiela
Jules Mahé
Grâce aux objets publicitaires, chacun peu mettre son empreinte sur un textile !